GAZ DE SCHISTE, DÉFINITION

Le gaz de schiste est un gaz naturel retenu à grande profondeur dans certains schistes des bassins sédimentaires. Il n’est donc pas retenu sous une couche imperméable, comme c’est le cas pour les gisements dits « conventionnels » de gaz ou de pétrole, mais emprisonné dans la roche elle-même. Pour l’en extraire, il faut opérer une fracturation de cette roche. On parle d’hydrofracturation, ou fracturation hydraulique, ou fracking).
La technique du fracking consiste à forer un trou jusqu’à 4 kilomètres sous terre dans la roche de schiste. Un mélange d’eau, de sable et de composants chimiques sont ensuite injectés sous très forte pression. La roche de schiste est alors fracturée laissant alors le gaz naturel prisonnier s’échapper.

L’exploitation de ces gisements est coûteuse et présente des risques pour l’environnement, dans le sous-sol, dans les nappes phréatiques et en surface.

LE MOT DES RÉALISATRICES

Voilà maintenant plus de deux ans que nous nous intéressons à la question de l’exploitation du gaz de schiste en France et en Europe, avec beaucoup d’intérêt car nous vivons l’une et l’autre sur un terrain concerné. Nous avons rencontré de nombreux acteurs impliqués dans ce dossier : les mouvements d’opposition, les élus locaux, régionaux, européens, les experts juristes, les hydrogéologues, les médecins, les toxicologues, les ingénieurs… etc.

De cette investigation, ressort des interrogations sur le processus démocratique. Qui décide du bien commun, de ce qui est bénéfique pour la communauté ? Qui assume les conséquences de ces décisions ?

La controverse autour du gaz de schiste est née parce que les décideurs n’ont jamais eu à se justifier ; ce sont les citoyens et les élus locaux qui ont eu la charge de réunir les informations pour d’avertir la population sur la nature des bénéfices mais aussi des risques de ces extractions. La difficulté d’accès à des informations claires, la récupération politique et la crise économique – qui ne fait pas des questions écologiques une priorité – sont autant d’obstacles à la compréhension par le grand public des enjeux de l’exploitation du gaz de schiste.

C’est cette réalité que nous voulons mettre en lumière avec ce film.

Nous sommes d’abord parties du terrain, des gens qui luttent contre les forages pour comprendre qui ils sont et les motivations de leur combat. Les opposants au gaz de schiste n’ont pas le profil classique de la revendication militante. Ils sont artisans, enseignants, de profession libérale, agriculteurs, de tous âges, de toutes opinions politiques et pas toujours écologistes. Ce qui les lie ? L’exercice d’une citoyenneté, ce que Stéphane Hessel appelait « l’indignation ».

L’idée était de mener une enquête approfondie s’appuyant sur des faits qui nous permettraient de décrypter les véritables enjeux géostratégiques, environnementaux, financiers et sociétaux du gaz de schiste.

Pour nous, cette nouvelle énergie fossile est le témoin d’une mutation profonde et décisive : nous arrivons au terme d’une époque d’abondance et de consumérisme triomphant, où l’énergie était peu chère et considérée sans limites. On sait aujourd’hui que les ressources fossiles ne sont pas inépuisables, et celles qui existent sont confisquées par une poignée de multinationales qui règnent sans partage sur la planète.

Le gaz de schiste est apparu comme une solution parfaite, un cadeau divin des industriels américains face aux problèmes du peak oil, dans une civilisation qui n’a pas conscience qu’elle est fondée sur l’énergie abondante et bon marché. À partir de l’expérience américaine, nous avons voulu faire comprendre aux spectateurs la nature et la gravité des risques de cette exploitation.

Il nous semble essentiel de rendre compte de ce que nous avons vu et entendu ici et là, et c’est la raison d’être du film.

Doris Buttignol et Carole Menduni

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