NOTE D’INTENTION DU REALISATEUR

J’ai choisi de m’arrêter sur le voyage de l’Héraclitus de France (Sète) en Tunisie (Tabarka) en passant par la Corse. Cela représente un voyage de deux mois.

Ce voyage artistique et scientifique en bateau est conduit vers la Tunisie par des marins dont les origines culturelles et identitaires sont diverses. Une caméra se pose sur ce bateau et témoigne de la diversité du monde, cadrant l’horizon de la mer, elle inscrit des diagonales dans le temps en intégrant, la devise d’Héraclès « le mouvement est la seule constante ».
Cette caméra navigue, accompagne les personnages pour mieux les découvrir dans leurs caractères intimes et poétiques et construit ainsi la narration du film.
Les marins deviennent un temps des acteurs, récitent, déclament ou dansent soit le pont soit à l’intérieur du bateau.

Dans ce voyage en mer, l’Héraclitus est traité visuellement et narrativement comme personnage étrange et mystérieux, les éléments matériels du bateau (voiles, cordes, etc…) sont filmés comme des détails « vivants ».
Dans cette abstraction liquide, il est solide comme une baleine, se dirige vers l’avenir et va recueillir les témoignages d’un temps, les témoignages des gens de la mer.

Ce film est une réflexion sur le théâtre, l’idée de transposer le théâtre dans un autre espace (celui de la mer) est très intéressante, car le fait de le faire sortir de son cadre propose une lecture différente et dans cette idée de transposition, il y a de nombreuses métaphores possibles comme celles de l’immigration, de l’identité.
Nous déplaçons des idées et des hommes dans un autre espace et les faisons « acter » autrement et là, par ce théâtre, je propose la mer Méditerranée comme un territoire de recherche créatrice.

Le but de l’expédition du bateau est d’enregistrer les histoires et légendes Méditerranéennes des gens de la mer.
De ce matériel, nous allons créer un autre matériel narratif théâtral car nous allons mettre en scène ces histoires par les marins/comédiens.
Ils vont aussi, dans un deuxième temps travailler une direction théâtrale à partir de leur histoire personnelle liée aux territoires intimes et lointains, au langage, et à la mer.
Je vais construire leurs personnages en trouvant des liens qui relient ces histoires entre elles.

La Tunisie a été le berceau du printemps arabe, je vais par ce film donner à ces événements un regard poétique qu’engendrent la liberté et son devenir.

A terre, je vais faire une performance avec de jeunes Tunisiens qui sera reprise par les marins sur le bateau. Par ce principe je vais installer une construction narrative autour de l’échange des idées, un va-et-vient que l’on retrouve dans la structure générale du film.

Ce film est une pensée sur les valeurs humanitaires, il devient le messager d’un discours contemporain sur le voyage, l’écologie, la territorialité et les nouvelles frontières virtuelles que représente notre monde. La Méditerranée a été le berceau de la civilisation européenne, la voie maritime a été l’accompagnatrice de son développement culturel.

Ce film témoigne par le théâtre que nous sommes tous reliés par des liens, des histoires d’où et où va le monde méditerranéen.

L’acte de création est, en ce qui me concerne une prise de risque et ne participe pas à un confort. Ce projet tire son essence d’un engagement politique et artistique, il offre la possibilité à un public de voir comment on transcende les actes, les difficultés liées à l’actualité dans le monde lors d’un voyage.

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